mercredi 14 décembre 2016

"Les sirènes de Budapest" (Roman, Bernard Campiche Editeur, 2004)


Dans Les Sirènes de Budapest, Frédéric Lamoth dresse avec beaucoup d'intelligence et d'émotion le portrait d'une génération de réfugiés hongrois venus en Suisse en 1956. Le thème des Sirènes de Budapest est la mémoire, mémoire que les anciens cherchent à transmettre aux jeunes, qui n'en sont pas toujours conscients. Ici, le lien se tisse autour d'une langue et d'un pays d'origine communs, le hongrois et la Hongrie. Le narrateur, un étudiant, n'avait jamais pris conscience du passé de ses parents et des incidences de l'Histoire sur leurs vies. C'est un homme de soixante-huit ans qui va le lui faire découvrir.

Traduction hongroise: Budapesti ködharangok (Traduit par Füzesi Piroska), éd. Aeternitas 2006

Revue de presse (voir plus)

Le passé interrogé

       Entré en littérature l’an dernier avec La Mort digne, où il faisait montre d’autant de maturité que de maîtrise dans le traitement d’un thème délicat, Frédéric Lamoth poursuit avec une belle progression avec ce roman plus intimement engagé, puisque le jeune auteur, de père hongrois, interroge ses racines par le truchement d’un lien noué entre un étudiant et un handicapé, la soixantaine finissante, qui l’engage au titre de secrétaire particulier. Dans une atmosphère évoquant le temps suspendu d’une autre Europe, le jeune narrateur est conduit dans une région de l’Histoire où plongent ses propres racines.

JEAN-LOUIS KUFFER, 24 Heures


Frédéric Lamoth éclaire une page d’histoire qui le concerne
Le jeune auteur va la rencontre d’une génération de réfugiés venus en Suisse en 1956
Un roman des origines qui séduit par son atmosphère, dans une forme un peu engoncée.

Frédéric Lamoth, jeune médecin né à Vevey de père hongrois et de mère suisse, aborde la trentaine avec deux fictions en poche. Il est entré sur la scène littéraire romande l’année dernière avec La Mort digne, où, condamné par la médecine, un officier instructeur à la retraite planifie sa mort comme il avait organisé sa vie: avec discipline et efficacité. Le parcours du mourant était retracé par son fils. L’auteur aborde le thème de la filiation de façon plus intime dans son deuxième roman paru en octobre, puisqu’il y questionne, par héros interposés, ses propres origines. À l’instar de son premier livre, un jeune adulte relate les derniers mois d’un sexagénaire dans Les Sirènes de Budapest, où le narrateur n’est pas le fils, ni le beau-fils (il s’en est fallu de peu), mais le «secrétaire particulier» du bientôt mort, dont il va cependant devenir l’héritier d’un secret lourd de douleurs.
Georges Toth, handicapé suite à une attaque cérébrale a engagé François Kàrolyi afin qu’il s’occupe de sa correspondance et lui fasse la lecture. Activités immédiatement ou vite délaissées pour de longues conversations, et non pour un monologue sinueux, comme pourrait le faire penser le texte, qui tire une grande force de cette ambiguïté. Car derrière le récit de vie de Georges, dont la narration chercher à éclairer les zones tenues dans l’ombre, une autre histoire s’esquisse, celle de François qui, en explorant les racines du vieil homme, ressent le besoin de démêler les siennes. Racines ancrées dans un terreau commun, la Hongrie, où Georges et les parents de François ont vécu avant de partir en exil.
Après s’être évertué à le fuir sa vie durant, Georges exhume son passé avec obstination. François récolte, puis assemble les souvenirs de ce Juif errant, dont il écrit le mythe plus que la biographie, laissant tourner les confidences dans son esprit qui y mêle son grain de fiction. Ce voyage au pays de la mémoire (individuelle et collective) est intelligemment organisé par Frédéric Lamoth, qui remonte le temps pour aller à la rencontre d’une génération de réfugiés hongrois venus en Suisse en 1956. Si cet écrivain débutant passe aisément l’épreuve du second roman, sa plume (encore) frileuse manque d’élan. En résulte un récit appliqué, qui a une belle tenue, mais peu de personnalité, qui contient trop de poncifs, d’images déjà taillées et retaillées par d’autres auteurs. Les Sirènes de Budapest vaut néanmoins le détour tant pour son propos historique, ses méditations sur «le terrain vague du passé» que pour ses intrigues, finalement tellement banales, comme la vie, où les hommes meurent avec leur mystère.

ÉLISABETH VUST, 24 Heures


Un étudiant en médecine en déroute répond à une petite annonce demandant «un secrétaire particulier parlant hongrois». C’est la langue de son enfance, il a besoin d’argent et de dérivatif: il va donc lire pour un grand malade, reclus dans une villa de la côte lémanique, le Kaddish pour l’enfant qui ne naîtra pas d’Imre Kertesz. Et surtout, ce jeune homme va entrer dans un univers gris, sous lequel s’agitent encore faiblement des secrets de famille, avec leur lot ordinaire de culpabilité et de souffrance. Lui-même est d’une famille hongroise chassée par les événements de 1956. Aux souvenirs de son étrange employeur, il va donc confronter ceux qu’il a hérités des siens et découvrir «le poids de l’Histoire dans nos vies». Désemparé, sans but réel dans la vie sinon d’écrire, il semble se laisser gagner par la mélancolie qui se dégage de ses rencontres quotidiennes. Une silhouette féminine s’y dessine parfois: la fille du malade. On se dit qu’une histoire d’amour pourrait naître entre ces deux solitaires, mais non, c’est comme s’il ne restait plus assez de force vitale pour enflammer un sentiment. Frédéric Lamoth, comme son narrateur, est d’origine hongroise par son père. Devenu médecin, il a déjà publié La Mort digne en 2003.

ISABELLE RÜF, Le Temps


Le passé à découvert
Un étudiant en médecine répond à une petite annonce, un vieil homme cherche un secrétaire particulier parlant hongrois. Le jeune François lui fait la lecture et, surtout, l’écoute raconter ses souvenirs de réfugié qui a fui la Hongrie de 1956. Le narrateur y découvre les secrets de ce passé et prend conscience de l’histoire de ses propres parents.
Dans Les Sirènes de Budapest, le Vaudois Frédéric Lamoth (auteur en 2003 de La Mort digne, son premier roman) tisse avec subtilité les liens entre ces deux personnages. La construction se révèle habile, le thème de la mémoire et de sa transmission est exploré avec justesse. Le livre reste toutefois fort classique et d’un style parfois à la limite du convenu.

ÉRIC BULLIARD, La Gruyère



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